J +10 - Premier évent / Street art / Soirée ?

Le samedi, je rencontrais l'un des artistes qui allait exposer durant la première soirée que j’organisais. Sortis du métro, je me rendis compte que j’avais un peu d’avance, alors j’en profitais pour découvrir le quartier que je ne connaissais pas. Je le trouvais assez fascinant, avec ces énormes murs recouverts de trainées de peintures, parfois colorées et stimulantes, parfois noires et glaçantes. Je ne savais pas vraiment à quoi correspondaient ces œuvres, ce qu’elles signifiaient ni par qui elles avaient été peintes, mais elles étaient fréquentes à Berlin et donnaient une tonalité particulière aux quartiers qu’elles habitaient. 


L’artiste habitait seul (élément d’une grande rareté à Berlin !) dans un appartement aux charmes indéniables. Il était très sympa et très pro, ce ne fut pas bien compliqué de se mettre d’accord sur le montage vidéo ! Ensuite, nous avons parlé de la ville et de ses innombrables avantages. Par pur logique, nous en sommes arrivés à évoquer le monde de la nuit et je lui ai demandé quelques conseils. Il m’expliqua que le soir même se tenait un événement dans un de ces clubs préférés. En regardant l’adresse, je constatais avec enthousiasme que c’était juste à côté de chez moi ! Je repartis alors de chez lui très, très heureuse de me dire que j’allais certainement faire la grosse teuf le soir même et ce sans avoir à me taper 40 minutes de transports en commun ! Ce n’est que quelques minutes après qu'une information est montée à mon cerveau : je n’avais pas d’acolyte de soirée. Ah, rudes habitudes quand tu nous tiens, je n’avais pas encore le reflex de me dire que si je voulais vraiment quelque chose, il fallait que je le fasse seule - 'plutôt que mal accompagnée' ! D’après plusieurs personnes, sortir solo à Berlin était une véritable partie de plaisir. Mais là, malgré une petite voix me disant « mais oui, ça va être trop chouette, et puis tu vas forcément faire de belles rencontres », j’en avais aussi une autre, qui résonnait davantage : « Non mais sérieux ? Tu vas attendre jusqu’à 1h du mat juste pour aller re-attendre pendant 30 minutes dans un froid glacial ? Ah non vraiment pas la motivation là ! ». Bref, après ce court interlude entre mon moi enthousiaste, sociable et téméraire et mon moi paresseux et frileux, j’arrivais à la coloc sans trop savoir si je trouverais la force d’en ressortir. Je bossais un peu, je chillais un peu, jusqu’à ce que mon ventre crie famine et que mes narines me dirigent tout droit vers la cuisine. Good choice : je pus me délecter grâce aux talents de cuisinier de mon coloc. Une fois attablée, ce dernier mis de la musique à fond les ballons et se mit à danser en me disant, plein d’entrain, « allez, ce soir on va faire la fête !! ». Je le regardais en riant, assez envieuse de cette motivation débordante, la mienne étant retombée à un niveau proche du zéro. Je lui parlais tout de même parlé de l’endroit évoqué par l’artiste. Il semblait tout à fait partant, ce qui me remit un peu d’aplomb ! On a discuté d’autres choses, et une fois mon repas englouti, je lui dis « Alors, on se motive ? ». Et c’est là qu’il me regarda l’air malicieux et me répondit « ça te dit pas un film ou une série plutôt ? ». J’ai explosé de rire et je me suis dit que ça m’allait vraiment bien. Le nous paresseux avait gagné… C’est ainsi que nous avons découvert « Dark », série allemande que nous avons ensuite dévorée en deux semaines. Je la conseille donc vivement, pour sa réalisation aux couleurs fantastiques et son intrigue à la fois perturbante et hypnotisante (A noter aussi : le symbole du Livre des Ombres est très présent, rien que ça se suffit à soi-même !).  

Le dimanche, je décidais d’aller dans un musée qui venait d’ouvrir, entièrement dédié au Street-art : "Urban nation". Je pris une véritable claque en découvrant la magnifique sélection des œuvres. Le lieu était aussi très intéressant, jouant tout autant avec les travaux exposés qu'avec la prise en compte du public qui allait les découvrir. Il était constitué de deux étages qui dialoguaient entre eux grâce à des sortes de balcon. On pouvait donc d'une part voir les œuvres sous des angles très différents, mais aussi observer les autres observateurs et leurs réactions. Bon, dis comme ça je ne sais pas si ça semble particulièrement audacieux, mais une fois sur place ça faisait vraiment son effet ! 


J'y ai aussi trouvé les toilettes les plus beaux au monde, et ça c'est pas rien ! Leurs portes, constituées principalement de miroirs, laissaient y refléter l'intégralité des murs adjacents, tagués de toutes parts. A l'intérieur des toilettes, les façades étaient aussi dédiées à l'expression libre : tout le monde pouvait y mettre sa petite patte. 


Ce qui me questionna le plus à la sortie de cet espace, c’était de comprendre comment ce type de lieu pouvait exister. Car on y trouvait des œuvres des plus grands graffeurs de l’époque, le musée était bien placé et grand, parfaitement bien rénové, et l’entrée était gratuite. Comment faisaient les berlinois pour rentrer dans leurs budget ?! On avait vraiment à apprendre de cette vision de l’art, donné à tous, partout, tout le temps, sans borne aucune. 

Le mardi, je passais la journée au boulot – passionnant soit dit en passant – et le soir je m’échappais rapidement pour aller rejoindre le bar où se tenait la première soirée que j’organisais à Berlin ! Arrivée sur place, je me rendis compte que j’avais eu des raisons de me sentir un peu stressée. L'écran n’était pas à la taille attendue, ce qui entrainait un problème de projection : l’image était trop grande par rapport à l’écran, et nous ne pouvions pas déplacer le vidéoproj en lui-même. Ce n’est qu’après maints essais et réglages que tout fut correcte. Il était alors 19h30, heure à laquelle l’événement débutait.
Ensuite, je commençais à espérer que le lieu ne reste pas vide, puis je vis arriver des groupes de personnes petit à petit, jusqu’à ce que le bar soit littéralement plein ! Au bout d’une heure, tout le monde était bien en place, bien bruyant et bien content. Je me dis alors que c’était certainement le moment de débuter la projection, et informait mon boss qu’on allait démarrer si cela lui convenait. C’est alors qu’il me lança un petit « Prête pour faire taire tout le monde ? ». Ni une ni deux, je m’avançais au centre de la pièce et, une seconde avant d’ouvrir la bouche, pris conscience qu’il fallait que je fasse la présentation en anglais. Désormais lancée, je n’eus pas vraiment le temps de me poser de questions, et m’élançait à gorge déployée au milieu du bar. J’eus alors cette agréable sensation d’être le parfait stéréotype de la française qui n’a aucune honte à parler un anglais déplorable accompagné d’un accent à couper au couteau. J’eus droit à des regards de toutes sortes, dont celui d'un jeune homme qui devait penser que j’étais en train de le gronder aux vues des yeux qu’il me lançait ! Mais la voix qui porte autant c’est pas pratique pendant toute ta scolarité, autant ça l’est dans ce type de situation ! Cela attira l’attention et tout le monde se tut pour laisser place aux projections.

Je passais alors une super soirée, accompagnée par quelques gentils copains passés me voir. Je scrutais cependant le reste du public afin de déceler des signes de satisfaction ou de mécontentement. Je vis principalement de bonnes têtes aux mentons relevés et aux yeux rivés sur l’écran. Celui-ci semblait s'être transformé en objet mystique, baignant leurs visages, pourtant dans la pénombre, d’une forte lumière.


Une fois l’écran éteint, ce fut le reste de la pièce qui s’éclaircit, laissant rejaillir les rires de toutes parts. Suite à cela, je rentrais avec mon coloc et au cours d’une conversation sur sa vie passée, j’appris qu’il avait encore plus voyagé que ce que je pensais, ayant vécu durant plusieurs mois dans quatre différents pays. Il m’expliqua qu’en Allemagne, le gouvernement faisait tout pour que les jeunes voyagent le plus possible, et ça fonctionnait. Les candides allemands avaient tendance à partir juste après le bac, et découvrant l’amour de vivre au contact d’autres cultures, ne s’arrêtaient jamais vraiment de voyager. Il était alors fréquent que les Allemands finissent leurs études très tard, mais s’étant entre temps nourris de nouvelles cultures, représentations et connaissances. Tout cela me parut n’être que positif, et même si cela tendait à changer, je me dis qu’en France, il était encore courant de passer pour un branleur si l’on expliquait à son employeur avoir passé cinq ans à voyager. Alors que finalement, je crois que c’est tout aussi (si ce n’est plus ?) enrichissant que de longues études.

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